L’indemnisation en vertu des traités d’investissement

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IISD | novembre 2020

L’indemnisation en vertu des traités d’investissement

par Jonathan Bonnitcha et Sarah Brewin

1.0 Introduction

La vaste majorité des traités d’investissement permettent aux investisseurs étrangers de soumettre à une procédure d’arbitrage international des réclamations selon lesquelles un État hôte a enfreint aux dispositions d’un traité. Si le tribunal d’arbitrage conclut que l’État hôte a enfreint le traité, il ordonne systématiquement à l’État hôte d’indemniser l’investisseur étranger. Les principes juridiques qui régissent l’indemnisation – et la manière dont les tribunaux ont interprété et appliqué ces principes – déterminent ensuite le montant à verser par l’État hôte. Ainsi, les principes régissant l’indemnisation ont des implications directes tangibles pour les États, les investisseurs et les autres participants au régime du traité d’investissement concerné.

Lire aussi: L’indemnisation en vertu des traités d’investissement : Quels sont les problèmes et qu’est-il possible de faire ?

1.1 Les raisons pour lesquelles la question de l’indemnisation mérite l’attention des responsables politiques

Au cours des deux dernières décennies, la jurisprudence arbitrale s’est développée du fait de la hausse rapide du nombre de procédures d’arbitrage liées à des traités d’investissement. Dans d’autres domaines où l’évolution de jurisprudence arbitrale a pris des tournures inattendues – par exemple, dans le cas d’interprétations très larges de dispositions prévoyant un traitement juste et équitable – les États ont répondu en reconsidérant la formulation et l’inclusion de ces dispositions dans leurs traités.
Toutefois, la question de l’indemnisation n’a pas suscité le même niveau d’attention. Il semble que la dimension quelque peu technique de la jurisprudence arbitrale sur l’indemnisation a généré une certaine impression selon laquelle il est préférable de confier aux arbitres le soin de traiter de ces questions.

Les principes régissant l’indemnisation sont trop importants pour que seuls les arbitres s’en chargent. Plusieurs centaines de millions – voire des milliards – de dollars sont souvent en jeu. Les États devraient déterminer si la jurisprudence actuelle qui régit l’indemnisation correspond à leur perception originelle de la façon dont allaient fonctionner leurs systèmes de traités d’investissement. Si tel n’est pas le cas, ils devraient examiner les possibilités qui existent en matière de réforme. Plusieurs raisons nous amènent à penser que la jurisprudence actuelle régissant l’indemnisation pourrait ne pas correspondre aux objectifs initiaux des États parties par rapport aux traités d’investissement.

1.1.1 Les montants des indemnisations attribuées sont énormes – et ne font qu’augmenter

Au début des années 2000, les attributions d’indemnisations se montant à plusieurs dizaines de millions de dollars américains étaient considérées comme élevées. Rétrospectivement, ces montants semblent pour le moins dérisoires. À l’heure actuelle, la plus grosse indemnisation dans une procédure d’arbitrage concernant un traité d’investissement, d’un montant de 40 milliards USD, a été attribuée dans l’affaire Hulley c. Russie. (Il s’agissait de la plus importante d’une série de réclamations suite à la nationalisation deYukos, où 50 milliards USD au total ont été attribués.) Actuellement, il existe 50 affaires connues dans lesquelles un tribunal a attribué une indemnisation de plus de 100 millions USD. Ces affaires figurent à l’Annexe A.

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source: IISD