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Commission européenne | 29 février 2016
AECG: l’Union européenne et le Canada s’entendent sur une nouvelle approche en matière d’investissements dans l’accord commercial
Cet accord marque une nette rupture par rapport au système actuel de RDIE et traduit la volonté de travailler ensemble à la mise en place d’une juridiction multilatérale en matière d’investissements.
La Commission européenne et le gouvernement canadien sont convenus d’inscrire une nouvelle approche concernant la protection des investissements et le règlement des différends en matière d’investissements dans l’accord économique et commercial global UE-Canada (AECG).
Les négociations relatives à un accord de libre-échange entre l’Union et le Canada se sont conclues en 2014 par la révision du système de règlement des différends en matière d’investissements, établissant notamment une transparence totale des procédures ainsi que des normes de protection des investissements claires et non équivoques.
À la suite de l’examen juridique du texte, l’accord qui vient d’être conclu va encore plus loin. L’ensemble des principaux éléments de la nouvelle approche de l’Union en matière d’investissements, énoncés dans sa proposition relative au TTIP de novembre 2015 et compris dans l’accord de libre-échange UE-Viêt Nam récemment conclu, a été intégré dans le texte final de l’AECG.
Il s’agit d’un changement radical par rapport à l’ancienne approche concernant le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE); cet accord montre également la volonté commune de l’Union et du Canada de remplacer le système actuel de RDIE par un nouveau système de règlement des différends et de progresser vers la mise en place d’une juridiction multilatérale permanente en matière d’investissements. La version révisée du texte de l’AECG constitue aussi un signal clair de l’intention de l’Union d’inclure cette nouvelle proposition en matière d’investissements dans ses négociations avec tous les partenaires.
«Je suis très heureux que nous soyons parvenus à conclure cet accord avec nos partenaires canadiens» a déclaré le premier vice-président Frans Timmermans à ce sujet. «Grâce aux modifications convenues, nous alignons parfaitement l’AECG sur notre nouvelle approche en ce qui concerne la protection des investissements dans les accords commerciaux. Plus particulièrement, nous démontrons notre volonté de protéger le droit des États de réglementer et de faire en sorte que le règlement des différends en matière d’investissements respecte pleinement l’état de droit.»
«Je suis ravie du résultat obtenu», a déclaré Cecilia Malmström, commissaire européenne pour le commerce. «L’AECG tient compte de notre nouvelle approche en matière d’investissements et de règlement des différends. En faisant fonctionner le système comme une juridiction internationale, ces changements permettront aux citoyens d’avoir confiance en sa capacité à rendre des jugements équitables et objectifs. Nous pouvons affirmer avec certitude que nous avons répondu aux attentes, aussi bien des États membres que du Parlement européen.»
L’inscription dans l’AECG de la nouvelle approche de l’Union concernant la protection des investissements et le règlement des différends en matière d’investissements a été convenue dans le cadre de l’examen juridique du texte de l’accord commercial.
Outre l’amélioration des conditions relatives à la protection des investissements, l’AECG offrira aux entreprises de l’Union de meilleures perspectives commerciales au Canada et favorisera l’emploi, en facilitant les échanges commerciaux entre l’Union et le Canada. En vertu de l’accord, 99 % des droits de douane seront supprimés, ce qui permettra aux exportateurs de l’Union de réaliser des économies à hauteur d’environ 470 millions d’euros par an pour les produits industriels. L’accord mettra fin aux limitations d’accès aux marchés publics en rendant possible la participation des entreprises de l’Union aux appels d’offres publics, tant au niveau fédéral qu’au niveau des provinces, des régions et des villes du Canada. L’AECG ouvrira le marché des services, ce qui permettra aux professionnels de l’Union de travailler plus facilement au Canada. Le Canada reconnaît également le statut spécial des indications géographiques protégées de l’Union en acceptant de protéger sur son territoire une liste de 145 produits européens, comme les jambons «Prosciutto di Parma» et «Schwarzwälder Schinken». Le nombre d’obstacles administratifs à franchir sera moins important pour toute une gamme de produits, puisqu’il n’y aura plus de duplication des essais de part et d’autre de l’Atlantique, ce qui bénéficiera aux entreprises plus petites en particulier.
Conformément à son engagement constant en faveur de la transparence, la Commission européenne a publié aujourd’hui le texte de l’accord après qu’il a fait l’objet d’un examen juridique, y compris le texte convenu sur la protection des investissements et le règlement des différends en matière d’investissements. Une fois que ce texte aura été traduit dans toutes les langues officielles de l’Union, il sera transmis au Conseil et au Parlement européen pour permettre à ces deux institutions de débattre de son contenu et de se prononcer sur son approbation.
En ce qui concerne les investissements, l’accord comprend:
– une formulation plus contraignante quant au droit de réglementer à tous les niveaux de gouvernement en ce qui concerne la protection des investissements;
– la mise en place d’un tribunal permanent et institutionnalisé chargé de régler les différends, ce qui représente une rupture nette par rapport au système actuel d’arbitrage ad hoc. Les membres du tribunal ne seront plus nommés par l’investisseur et l’État concernés par le différend, mais seront nommés à l’avance par les parties à l’accord;
– des règles d’éthique plus détaillées pour éviter tout conflit d’intérêts. À titre d’exemple, les membres du tribunal et de la cour d’appel auront l’interdiction d’intervenir comme avocats ou experts dans d’autres différends en matière d’investissements;
– un système permettant de faire appel, comparable à celui qui existe dans les systèmes juridiques nationaux, dans le cadre duquel les décisions seront examinées du point de vue de leur légalité et annulées en cas d’erreur;
– l’engagement de l’Union européenne et du Canada d’unir leurs efforts à ceux d’autres partenaires commerciaux pour mettre en place une juridiction multilatérale permanente en matière d’investissements ainsi qu’un mécanisme d’appel permanent.
Contexte
Les principaux éléments du chapitre révisé de l’AECG sur les investissements sont décrits ci-dessous.
Protection des investissements
La version révisée du texte de l’AECG comprend un nouvel article qui garantit que le droit de réglementer à des fins de politiques publiques est pleinement préservé. Cet article garantit également que les dispositions relatives à la protection des investissements ne seront pas interprétées comme un engagement des gouvernements de ne pas modifier leur cadre juridique. Cela clarifie le fait qu’une mesure susceptible d’avoir des répercussions négatives sur un investissement ou sur les bénéfices attendus par les investisseurs n’est pas en contradiction avec l’accord pour cette seule raison.
Une autre disposition précise que l’AECG n’empêchera pas l’Union de faire appliquer ses règles en matière d’aide d’État.
Établissement du tribunal
L’AECG établit un tribunal permanent de quinze membres qui pourra être saisi pour des demandes relatives à la violation des normes de protection des investissements définies dans l’accord. Les membres du tribunal compétents pour connaître des différends en matière d’investissements seront nommés par l’Union européenne et le Canada et seront hautement qualifiés et irréprochables du point de vue éthique. Des divisions du tribunal composées de trois membres seront chargées de l’examen de chaque affaire particulière. Le texte de l’AECG s’appuie désormais sur la nouvelle approche de l’Union telle qu’énoncée dans l’accord de libre-échange UE-Viêt Nam récemment conclu et la proposition de l’Union relative au TTIP.
Cour d’appel
Alors que le texte initial de l’AECG prévoyait la possibilité de créer un mécanisme d’appel dans les années à venir, sa version actualisée institue une cour d’appel dès l’entrée en vigueur de l’accord. Elle définit également les relations entre les décisions de la cour d’appel et celles du tribunal. L’Union et le Canada adopteront rapidement une décision du comité mixte de l’AECG qui intégrera des éléments techniques supplémentaires nécessaires pour rendre opérationnelle la cour d’appel.
Juridiction multilatérale en matière d’investissements
L’Union et le Canada partagent l’objectif de mettre en place une juridiction multilatérale permanente en matière d’investissements. Le texte de l’AECG reconnaît qu’un tel mécanisme multilatéral viendra remplacer le mécanisme bilatéral établi dans l’AECG.
AECG et droit interne
La version révisée du texte de l’AECG confirme que le tribunal doit uniquement appliquer l’accord, conformément aux principes du droit international, lorsqu’il statue sur les demandes présentées par les investisseurs. Il n’est pas habilité à se prononcer sur des questions de droit de l’Union ou d’un État membre. Il peut uniquement prendre en considération le droit de l’Union ou des États membres en tant qu’élément de fait, pour s’assurer par exemple que les droits de propriété en cause sont effectivement détenus par l’investisseur. Par conséquent, son interprétation du droit de l’Union ou des États membres ne sera pas contraignante pour les juridictions ou les gouvernements de l’Union. Le texte énonce également noir sur blanc que la détermination de la légalité d’une mesure adoptée par une partie au regard du droit interne reste le monopole des autorités compétentes de la partie concernée.
Texte initial de l’AECG et amélioration nécessaire
Le texte initial de l’AECG, publié en août 2014, prévoyait déjà le système le plus progressiste concernant la protection des investissements et le règlement des différends en matière d’investissements. Le texte comprenait des normes de protection clairement définies, établissait la transparence totale des procédures, une interdiction de la course aux tribunaux («forum shopping»), le contrôle de l’État sur l’interprétation de l’accord, un code de conduite rigoureux, le rejet rapide des recours non fondés et le principe du «perdant payeur» afin d’éviter les recours abusifs.
L’approche de l’Union concernant le règlement des différends en matière d’investissements a continué d’évoluer depuis et le texte de l’AECG intègre désormais l’ensemble de ses nouveaux éléments essentiels.